Incidence des régulations de l’action sociale et médico-sociale sur la diversité des organisations :

Et si la forme tuait le fond ?

« ...fond et forme sont le même fait de vie. »
Victor Hugo, Utilité du beau, Proses philosophiques, 1860-65

Avons-nous toujours conscience de la manière dont les objets et dispositifs techniques que nous utilisons configurent nos pratiques ? Quelle fut l’influence de l’imprimerie de Gutenberg sur la transmission des idées ? Quelle est l’incidence du numérique sur la mise en forme de nos conceptions du monde ?

Le secteur de l’action sociale et médico-sociale est, comme toutes les activités humaines et sociales, logé à cette enseigne de la conformation des pratiques par des techniques.

Comprendre l’ampleur de ces phénomènes de configurations technologiques pour le travail auprès des personnes accompagnées par les établissements et services sociaux et médico-sociaux est un enjeu majeur pour l’évolution de l’action des associations à vocation sociale qui représentent près de 80% de l’activité de ce champ. Majoritaires dans l’action, elles semblent peser plus discrètement sur la détermination des orientations et, notamment, sur la définition des outils techniques mobilisés.

Les dispositifs d’appels à projets, les formes de tarification – en forte évolution dans le cadre de la généralisation des CPOM et du groupe de travail Serafin PH – mais aussi les systèmes de convergence tarifaire, d’analyse des besoins, les outils relatifs aux droits des personnes accueillies sont des dispositifs techniques qui influencent considérablement les modalités d’action.

Ces journées d’étude souhaitent explorer un peu plus avant les effets de ces dispositifs techniques sur le fonctionnement même des associations intervenant dans l’action sociale et médico-sociale :

• -  Les cahiers des charges des appels à projet n’impliquent-ils pas une certaine uniformisation des missions des services qui limiterait la nécessaire diversité de l’offre ?

• -  Les normes de plus en plus précises n’induisent-elles pas une standardisation de la gestion qui fragiliserait la capacité d’innover des associations ?

• -  L’interprétation abusive et réductrice des « bonnes pratiques professionnelles » - qui sont utilisées parfois comme des carcans référentiels au profit de quelques lobbys – n’aliène-t-elle pas les marges de manœuvre nécessaires aux pratiques de la relation d’aide ?

Nous assistons actuellement à une reconfiguration massive de l’environnement technique des établissements et services sociaux et médico-sociaux. Cette mutation est rendue nécessaire par les défis qui se posent au travail social du 21ème siècle. Cette mutation peut être vécue comme une opportunité pour refonder les actions.

Cependant, un inventaire précis des effets des techniques de régulation du secteur, notamment sur le tissu associatif, est indispensable. Celui-ci est riche de sa diversité, il ne faudrait pas que les configurations techniques, les formes, lui fassent perdre ce qui constitue le fond des projets associatifs. La forme est au service du fond et non l’inverse !

Ces journées d’étude analyseront le lien entre les modes de régulation mis en œuvre dans le champ de l’action sociale et médico-sociale et les conséquences sur les pratiques et les organisations afin d’en tirer profit pour l'action. Il s’agira essentiellement d’envisager les stratégies à mettre en œuvre pour préserver la diversité des références théoriques et des modes d'organisation et, par voie de conséquence, la capacité créatrice des associations d’action sociale.